avril 26

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Les étirements avant le sport : bon ou mauvais ? Ce que disent les études

Depuis les années 2000, de nombreuses études ont remis en question le rôle des étirements sur la performance et la prévention des blessures. Des études plus récentes contre-disent ces résultats. Alors, les étirements à l’échauffement, c’est mauvais ou pas !?

Pendant des années, les étirements étaient considérés comme indispensables dans l’échauffement avec des vertus telles que : la prévention des blessures, le développement musculaire et la récupération.

Dans les années 2000, des études sont venues remettre en question la pertinence de l’intégration systématique des étirements pendant l’échauffement. Parmi ces études, ont cite souvent celle menée par Fowles et coll. (2000), qui démontre que les étirements ont un impact négatif non négligeable sur la performance.

Mais alors, pourquoi, d’autres études, plus récentes, arrivent à la conclusion inverse ?!

1. Étirement vs. Assouplissements

Avant même de passer en revue les études (et leurs protocoles) pour comprendre la variabilité des résultats, on pourrait dans un premier temps, commencer par définir ce qu’est un étirement… ou plutôt, LES étirements.

Lors d’un étirement, quatre éléments essentiels sont mis en jeu : le tendon ou le ligament, le muscle, l’aponévrose ainsi que les mécanismes de physiologie nerveuse.

Dans l’absolu, les étirements et les assouplissements fonctionnent sur le même principe. En revanche, leur « méthode de sollicitation » ainsi que leurs vocation sont complètement différentes.

Dans les deux cas, ces deux méthodes travaillent sur la mobilité et les amplitudes de mouvement (ou ROM pour Range Of Motion) qui sont naturellement limitées par nos articulations et nos muscles.

  • Les contraintes articulaires sont liées à la géométrie et la congruence (ou qualité) de l’articulation.
  • Les contraintes musculaires (actives ou passives) : les contraintes passives sont intimement liées aux propriétés structurelles du muscle et de son aponévrose (membrane fibreuse qui entoure le muscle). Les contraintes actives sont liées quant à elles à la tension d’un muscle lors de sa contraction dynamique.

Sachant cela, on peut distinguer les assouplissement et les étirements de la manière suivante :

Les assouplissements

Ils visent à améliorer l’amplitude et la mobilité articulaire. L’objectif de ces exercices actifs (ou passifs) est de gagner en souplesse / flexibilité (V.N. PLatonov, 1984).

Pour être efficaces, les assouplissements doivent être réguliers ET longs. Le travail d’assouplissement doit être abordé comme un travail de développement d’une qualité physique (la souplesse). Par conséquent il doit être planifié et organisé dans un programme d’entraînement spécifique (gymnastes, danseurs, escrimeurs, etc).

Les étirements

Ce sont des exercices spécifiques destinés à… étirer. 

Comme on l’a vu précédemment, les muscles ont tendance à se raccourcir et se durcir (résultat d’adaptations posturales (tensions) ou lié aux adhérences cicatricielles des tissus). Résultat : les muscles deviennent plus courts, ce qui limite l’amplitude du mouvement et crée des déséquilibres musculaires.

Les étirements visent donc à rétablir une amplitude musculaire optimale pour la réalisation d’un mouvement ou une suite de gestes.

Il existe de nombreuses méthodes d’étirements : statiques, dynamiques, contracté / relâché, etc. On ne rentrera pas dans les détails ici, l’article est déjà bien trop long !

2. Ce que disent (vraiment) les études

2.1. Impact des étirements sur la performance

En 1998, Kokkonen constate que les étirements passifs et actifs entrainent une baisse significative de force. Quelques années plus tard, la fameuse étude de Fowles et coll conclue également que les étirements passifs ont un effet néfaste (et durable > 1h après l’étirement) mais cette fois-ci sur la contraction volontaire musculaire maximale. La même année, Wiemann et Klee observent que les étirements passifs ont un effet négatif sur un autre facteur de performance, la vitesse.

Plus récemment (2007, 2011), de nouvelles études (Cramer & coll, Moss & coll, Ogura), obtiennent des résultats bien différents. Ces études suggèrent que les étirements statiques n’affectent absolument pas le niveau d’activation musculaire ainsi que la production de force.

2.2. Impact des étirements sur la prévention des blessures

En 1999, Shrier a réalisé une métanalyse pour évaluer les preuves scientifiques autour de l’hypothèse selon laquelle les étirements avant l’exercice préviendraient des blessures.

Il en a déduit que les étirements n’ont pas de rôle significatif sur la prévention des blessures. Il insistera même sur l’effet antalgique des étirements qui augmente la tolérance à la douleur et qui aurait donc plutôt tendance à favoriser les risques de blessures !

Pope & coll arrivent sur la même conclusion : un protocole d’étirement pendant l’échauffement et avant l’entrainement n’induit pas de réduction cliniquement significative des blessures.

Lally (1994) conclu même que les étirements entraîneraient 35% de blessures supplémentaires aux coureurs lorsqu’ils  réalisent des étirements avant une course longue distance (marathon).

D’autres études montrent que les étirements passifs amènent les muscles à leur tension maximale. Si les structures élastiques passives du muscle sont trop sollicités alors elles risquent de subir des micro-traumatismes, ce qui est évidement défavorables à la performance (Wiemann et Klee. (2000), Wiemann et al. (1995).

On remarque que l’ensemble de ces études traitent le sujet sur court à moyen terme ! Quid du long terme ?

3. Conclusion : peut-on s'étirer avant le sport ?

Depuis des années, les gens tirent les conclusions qui les arrangent en faisant référence à une ou deux études scientifiques sans tenir compte de son contexte ou même de son protocole.

Pourtant, en parcourant l’ensemble des études (dispo en fin d’article) on remarque que les résultats viennent complètement se contre dire. Pourquoi ? Parce que les protocoles varient considérablement et ne sont tout simplement pas comparables : durée des étirements, taille des échantillons, durée de l’étude, muscles étirés.

On remarque également que les études sont souvent réalisées à mille lieux de la réalité du terrain. Depuis quand fait-on des étirements de plus de 30 minutes sur un seul groupe musculaire avant un entrainement ?! Bref, il faut donc être prudent sur les conclusions à tirer.

Au vu des études à notre disposition ce jour, on peut cependant affirmer qu’il existe une relation claire entre la durée d’une séquence d’étirements statiques et la diminution de la performance.

On remarque des effets plutôt négatifs sur la performance (force, vitesse, puissance) lorsque des étirements statiques sont pratiqués pendant 60 secondes ou plus. En revanche, en deçà d’une certaine durée (<<<30 secondes), un étirement n’a AUCUN impact sur la performance.

Au lieu de se demander s’il est bon ou mauvais de faire des étirements, il faudrait plutôt se poser la questions de l’intérêt des étirements (ou des assouplissements) en fonction de l’objectif attendu et du type de séance à venir.


En Bref

Pour éviter la diminution de la force et de la performance en raison d’étirements statiques avant la compétition ou l’entrainement, un étirement court et dynamique est recommandé pour l’échauffement.

Il ne faut pas diaboliser les étirements longs. Au contraire… lorsqu’ils sont effectués au bon moment et à la bonne amplitude, ils peuvent s’avérer très bénéfiques : souplesse, compliance musculaire, drainage vasculaire, relaxation, etc. D’ailleurs, selon Pascal Prevost, sur le LONG TERME, les étirements peuvent également avoir un effet très positif dans la prévention des blessures. Cela fera l’objet d’un article dédié !)

Si l’objectif des étirements est de travailler sa souplesse et ses amplitudes de mouvement alors il faudrait incorporer des étirements statiques longs de façon régulière et structurée en dehors des séances d’entrainement.


Les études

- Impact sur la performance

Fowles et coll. (2000)

  • Objectif de l’étude :
    Evaluer la performance (force) de sujets jeunes après un étirement passif maximal.
  • Protocole :
    Les sujets ont subi une séquence d’étirements d’une durée de 35 minute au total (13 étirements de 135 secondes). Muscles concernés : les mollets (fléchisseurs plantaires). Un test isocinétique permet de mesure la force maximal des sujets après étirements.
  • Conclusion :
    Fowles et coll ont remarqué que des étirements passifs (135 seconde) jusqu’au seuil de douleur avaient un effet néfaste sur la contraction volontaire musculaire maximale de leurs sujets  (-25% !) et ce, jusqu’à plus d’une heure après l’étirement !

Wiemann et Klee (2000)

  • Objectif :
    Evaluer la performance (vitesse) de sujets après un étirement.
  • Protocole :
    Les sujets ont subi une séquence d’étirements d’une durée de 15 minute au total. Muscles concernés : les fléchisseurs / extenseurs de hanche. Mesure de la vitesse sur des sprints de 40m.
  •  Conclusion :
    L’étirement passif a un effet négatif sur la vitesse. En effet, les sujets perdaient en moyenne 0,14 secondes sur leur sprints.

Kokkonen (1998)

  • Objectif :
    Evaluer l’impact de 2 protocoles de stretching sur un test de 1 répétition maximale (1RM).
  • Protocole :
    Deux groupes : l’un subi des étirements passifs, l’autre des étirements actifs. Le groupe témoin ne s’étire pas.
  • Conclusion :
    Kokkonen constate une baisse significative de la force produite aussi bien avec des étirements passifs qu’avec des étirements actifs comparativement au groupe témoin (sans étirements).

Cramer et coll., (2007) 

  • Objectif : 
    Etudier l’impact des étirements statiques sur la puissance musculaire excentrique maximale.
  • Protocole : 
    Quinze sujets masculins sont testés sur des exercices de sollicitation musculaires excentriques maximales (muscles extenseurs du genou) à différents angles. Ils suivent ensuite un protocole d’étirements statiques et sont à nouveau testés sur les mêmes précédents exercices.
  • Conclusion :
    Les résultats suggèrent que l’étirement statique n’affecte pas le couple isocinétique excentrique maximal ou la production d’énergie, ni ne modifie l’activation musculaire.

Moss WR et coll. (2011)

  • Objectif :
    Etude de l’impact des étirements statiques sur l’activation des muscles pendant une tâche fonctionnelle exigeant une stabilité dynamique.
  • Protocole :
    26 sujets sains et physiquement actifs ont été recrutés. 13 ont suivi un protocole d’étirement statique de 14 jours pour les quadriceps et les ischio-jambiers. Des mesures ont été recueillies via un électromyogramme avant, immédiatement après la première séance d’étirement et après deux semaines d’étirements.
  • Conclusion :
    L’étirement statique, effectué de manière aiguë sur une période de 14 jours, n’entraîne pas de différences significative dans l’activation des muscles lors d’un atterrissage en chute libre.

Ogura Y, (2007)

  • Objectif :
    Etudier l’impact de la durée d’étirements statiques sur la contraction volontaire maximale (MVC) musculaire.
  • Protocole :
    10 sujets masculins volontaires ont subi 2 protocoles d’étirements statiques différents (30 secondes pour le 1er groupe, 60 secondes pour l’autre). Muscles concernés : ischios-jambiers.
  • Conclusion :  
    Les sujets ayant subi des étirements de 60 secondes ont vu leur MVC diminuer significativement. En revanche, il n’a pas été constaté de différence significative entre le MVC témoin et ceux des sujets ayant subi des étirements de 30 secondes. Par conséquent, il a été conclu que la courte durée (30 secondes) de l’étirement statique n’a pas eu un effet négatif sur la production de la force musculaire.

- Impact sur la prévention des blessures

Shrier (1999)

  • Objectif :
    Évaluer les preuves scientifiques et cliniques autour de l’hypothèse selon laquelle l’étirement avant l’exercice prévient les blessures.
  • Protocole :
    Etude d’un corpus d’articles concernant les étirements et leur impacts sur les blessures (notamment sur les lésions musculaires).
  • Conclusion :
    L’examen de la littérature scientifique détermine 5 raisons pour lesquelles les étirements avant les exercices n’empêcheraient pas les blessures. Shrier évoque l’effet antalgique des étirements. Le fait d’augmenter la tolérance à l’étirements, permet au sujet d’aller plus loin que ce dont il a besoin. Il s’habitue à la douleur (stretch tolérance) : ses récepteurs à la douleurs seront comme endormis. Le risque blessure pendant l’exercice est donc plus important !

Pope et coll. (2000)

  • Objectif :
    Etude de l’effet de l’étirement musculaire pendant l’échauffement sur le risque de blessure liée à l’exercice.
  • Protocole :
    1538 sujets de l’armée masculine ont été répartis en 3 groupes. Pendant 12 semaines, les deux premiers groupes ont suivi des étirements actifs de 6 groupes musculaires du membre inférieur avant l’entrainement. Le second groupe à du également ajouter des étirements statiques de 20 secondes. Le groupe témoin ne s’est pas étiré.
  • Conclusion :
    Un protocole d’étirement pendant l’échauffement et avant l’entrainement ne produit pas de réduction cliniquement significative de blessures liées à l’entrainement.

Lally (1994)

  • Objectif :
    Evaluer l’impact des étirements sur des coureurs de longue distance (marathon).
  • Protocole :
    Un échantillon aléatoire de 600 participants au marathon a été analysé.
  • Conclusion :
    Les coureurs ayant réalisé des étirements ont eu 35% de blessures de plus que ceux qui ne se sont pas étirés durant les 12 mois suivant le marathon.

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